C’est beau. C’est d’une grande beauté.
Beau, de toute la douleur humaine,
Quand on sait la transmuter!
Par bonheur!
Retranchés!
Il était assis dans la flaque, une jambe repliée.
Trempé, le dos et le crâne collés à la paroi.
Il tenait son fusil serré contre lui, en bouclier.
Sa bouche est restée fermée et ses yeux effarés.
Alors, son grand cri de peur ne s’est pas échappé.
Il était jeune, très jeune. Il était en apnée!
La trace laissée par la balle, sur son casque,
Brillait, contrastant avec sa pâleur griffée.
Son casque, il l’avait remis immédiatement.
Regarde-moi, regarde-moi!
Ce que tu dois faire, c’est respirer.
Respire, respire doucement!
En mode survie!
Inspiration?
Rage!
H-Humains!
Humains! Humains sous handicap, mais Humains! Humains, tout court!
Regardez une course de haies! Vous voyez des chevaux.
Quand on les aligne au départ, ce sont des chevaux, tous des chevaux.
Il y a des chevaux rouges, des chevaux noirs et des chevaux blancs.
Il y a des chevaux tachetés, des chevaux rayés et des chevaux à pois.
Ils sont, à peu prés, de même valeur, de mêmes capacités.
Tous pareils, au départ de la course, à égalité!
Ce sont toujours, tous, des chevaux.
D’autres espèces se fracturent, juste pour une histoire de couleur. Mais, pas eux. Eux, ils courent. C’est parti!
A la première haie, au premier handicap, tout peut, tout va changer!
Première haie, un se cabre, un autre s’étale et deux s’emplafonnent.
Et c’est reparti, jusqu’à la prochaine haie!
Ceux qui sont passés courent, l’air léger. Ce sont toujours des chevaux!
Restent trois chevaux sur le carreau. Un est blessé, l’autre cassé et le troisième est boiteux. Ceux qui sont restés sont débaptisés.
On les appelle des Handicapés et, déjà plus, des chevaux.
Ce ne sont plus que des bestiaux.
Pourquoi ne leur rend-t’on pas le nom qu’ils avaient avant, il y a quelques minutes encore, quand ils couraient parmi les autres?
C’est comme arracher verbalement leur peau.
C’est une mise au ban, cruelle et assassine.
Je vois l’homme en criminel, à large échelle.
Il n’y a pas lieu, ici, de nuancer!
Spéciale dédicace!
Avec toute la patate que je peux,
« A vous, Mère Michèle, fière syndicaliste! »
Mais si, bien sûr, vous la connaissez.
Vous la voyez passer, bizarrement penchée.
En étapes serrées, c’est la Mère Michèle!
Vous voyez la vieille dame penchée.
Mais, vous ne voyez pas, ce qu’elle a été.
Regardez-là. Elle le dit bien assez.
Une enfant avec ses secrets, la femme et puis la dame.
« Cuisiner, faire un bœuf bourguignon, pour inviter ceux que j’aime, à manger. C’est ça que, moi, je voudrais! »