Tu es passé, discret, derrière moi. Tu as voilé mes yeux, de tes doigts. Tu m’as demandé : « C’est qui? ». Tu avais changé un peu ta voix. Moi, j’ai répondu : « C’est toi! ».
Si un jour, moi aussi, je meurs, je voudrais qu’on passe du Bach. Ce n’est pas ce que j’écoute, d’ordinaire. Mais, Bach, c’est Bach. Je ne veux pas que des fidèles gravent sur ma tombe : C’était quelqu’un de bien. Ecrivez plutôt, car c’était mon chemin : Je ne suis pas une salope! Nathanaël.
Je ne veux pas de tombe, d’ailleurs, ça ne sert à rien. La rivière de la vie est un lieu beaucoup plus serein.
Je logerai en certains, jusqu’à ce qu’ils ne m’oublient ou ne meurent. Dans ma tête, il y en a plein qui ne sont plus, déjà, ailleurs.
Tu es en moi, Pierre, gravé au fer rouge, dans ma tête et mes artères. Tu y resteras, jusqu’à ce que, moi aussi, je meure. De ça, je suis certain. Je ne te rejoindrai pas, ça ne se passe pas comme ça. Je suis content que tu sois là, pour toujours, dans mon coeur. Pas d’envol pour toi vers l’ailleurs, je te garde en moi. Je vois, orienté vers moi, le sourire de ton petit coeur.
Tant que j’aurais une voix, je dirais, à mi-voix : Je t’aime, Pierre. Je t’aime, mon grand. Je t’aime, toi!
Et puis, après, moi aussi, je quitterai, je m’en irai. Je dirai : Continuez, oubliez-moi, vivez, mes frères!
Nathanaël
J’aurais été, toujours, même si j’ai vécu avec les autres, ce que je voulais être et pas ce qu’on attendait de moi. Comme toi, comme toi!
Tu voudrais bien, vraiment en fait, pouvoir parler avec tes aînés. Tu aimerais qu’ils cessent de te parler comme si tu avais huit ans. Pouvoir dire ce que tu penses, sans être repris ou félicité. Parler vrai et ne pas mentir, sans être interféré. Les vieux qui ne changent pas, ne le veulent pas. Ta parole honnête doit être adaptée!