Un vent hargneux se cogne aux arbres
La brume s’étire en longs doigts continus
Il n’est pas seul; un petit se serre contre lui
Le chemin est long; la lune éclaire un peu
Le grand boite bas et le petit est fatigué
Ils ont les petits pas des oiseaux blessés
Il fait froid; la neige écrasera le silence
Pour un monde en péril!
Ce grand livre ouvragé,
Au doux parfum butyle,
Il me sert à ranger
Mon nécessaire d’exil.
Mes soucis, mes erreurs
Et le temps indocile.
Ce qui fait que la peur
Fait se coucher le Nil.
Mes haines, mes amitiés
Et le monde en péril.
Le grand rire du dernier
Et les chagrins subtiles.
Du respect pour l’honneur
Et des amours reptiles.
Un grand souci de l’heure
Et des hontes imbéciles.
Je vais y faire entrer
Des rires et des babilles.
Des vieux os à ronger
Et des oiseaux qui trillent.
Ce n’est pas par humeur
Que je fabrique une île,
Un rêve accroche-cœur
Pour un monde en péril!
Les rumeurs de l’été,
Vas-tu rester gracile?
Le grand cri du dernier,
Dans un temps immobile.
De l’entrée en Octembre!
Les serments, ça reste!
C’est son heure!
Je m’offre un Temps Parfait!
Tous les arquets sont bons!
Dans le fond du jardin,
De l’aube, de la lavande
Et un bouquet de thym,
Le regard sur la lande.
Tous les arquets sont bons;
Il n’y a pas de traces.
Allons à la rivière;
Il y venait, hier.
Tout à côté du puits,
L’ombre des roses tendres;
Une chaise prend appui
Où le mur veut se fendre.
Le long piège à poissons
N’a pas changé de place.
Allons voir à l’étang;
Il y venait, souvent.
Dans le haut de la grange,
Des paupières se dessèchent;
Une faux, en alfange,
A côté d’une bêche.
Les lignes sont au fond;
Une d’elles se déplace.
Retournons par les bois;
Il y venait, parfois …
Tout au fond de l’aiguier,
Immobile, une perche;
Le lupin incliné
Que l’abeille recherche.
Après, tu mélanges tout!
« C’est de la chair de Limane, finement ciselée et cuite en serpettes. Quand il s’affole, le Limane, il se tient tout figé. C’est alors que l’on peut le peler et le trancher, tout debout-vivant. Une autre variété, qui est plus saisonnière, a le collet tombant. Là, tu as le corps de Nector; Nector, c’est le chien qui n’a peur de rien et c’est pour ça qu’il est mort. On en fera du pâté. Il y a trop rien à garder et c’est pas lui qui viendra finir les restes! Ça, c’est du gonflement, de pois et de froment, pour éponger le sang de la sauce rouge. Après, tu mélanges tout; tu les sers. »
Je courais à pleine volée!
Je courais à pleine volée; j’avais encore ma chance. Mon frère venait de se faire manger par le rideau de pluie; c’était le dernier. Je courais comme un acharné; j’y étais déjà presque. Je me suis arrêté, c’était trop beau; j’étais dans le beau d’un tableau, pile en son centre: « L’herbe verte ondulait, spatulée; le soleil faisait brûler les jaunes et la pluie zébrait ses rayons de miel. » De grosses gouttes tintèrent mes épaules; je courais à pleine volée; je n’ai pas été trempé. Victoire!