
Sur ton ardoise orange, est venue une fourmi.
A la question étrange, tu choisis de dire oui
Et ton trait la dérange; elle court en tout petit.
Sur ton ardoise orange, est venue une fourmi.
To Pierre-Pierro, Correspondances
Un sourire, un poème!
Quand que, moi, j’avais dix ans,
J’habitais où elle habite
Et ça faisait rire les glands:
J’avais une mère toute petite.
Mais, sais-tu que c’est géant
D’avoir une mère toute petite?
Tu ne fais plus le serpent,
Collé à une jambe en frite.
C’est pas un inconvénient
D’avoir une mère toute petite;
Tu te colles, entier-gluant,
Dans tout elle et t’en profite!
Les yeux clairs, le crâne au vent,
Un scarabée Front-Devant
S’en allait obstinément.
Ses pattes tiennent à la brindille.
Il avait pas froid aux dents,
Ce scarabée Front-Devant,
A ramper sur la jonquille.
Un papillon Mauvais-Sang
Lui a dit, dans un tournant :
« Si le soleil flambe autant,
C’est pour mieux voir ce qui brille.
Libre à toi, évidemment,
De ramper en t’acharnant;
Mais, tu rateras les quilles. »
« Libre à toi, le Mauvais Sang,
Te gonfler de vantements,
Tout cramer en un instant
Et puis mourir pour une quille.
Je vais au prochain tournant;
On m’attend depuis longtemps.
Je rends visite à ma fille. »
Le scarabée Front-Devant
Laissa là le garnement
Et, dans un envoûtement,
Il repartit en godille.
Le papillon Mauvais-Sang
Lui jeta des détruments
Et il reprit sa scintille.
Ce môme-là, c’est une assiette à frites. Il campe dans la cuisine, quand sa mère fait à bouffer. Il est gentil et attentionné. Il rajoute des patates dans la pile, quand sa mère a le dos tourné.
Celui-là, il est monté sur piles. Il rit, il chiale, on peut pas l’arrêter. Il faut lui scotcher les cils, pour pouvoir l’endormer. Il utilise les patates pour apprendre à jongler.
Ce môme-là, c’est plutôt une fille, le genre garçon manqué. Elle bat ses frères aux billes et elle leur fout des raclées. Elle se sert des patates pour les caillasser.
Ma tête de rides, mon oeil froid et mon oeil mort, mes dents pour mordre et ma voix de râle, tu veux ça?
— Celle-là, celle-là!
T’es sûr, tu vas pas courir te cacher dans une poubelle?
— Même pas, même pas!
Et ma tête de peur, au vieux chignon pas frais, derrière mes doigts d’horreur qui font clic quand mes dents claquent?
— Connais pas, connais pas!
Laquelle je te fais, en première?
— Celle-là, celle-là!
Je te conte une histoire,
Car le temps est mouillé
Et qu’il est un peu tard,
Pour s’aller promener.
C’est l’histoire du Renard,
Du fromage Pue-des-pieds
Et du vilain Corbard
Qui voulait le bouffer.
Je crois, il se fait tard
Et l’histoire s’est figée.
Voyons dans ma mémoire,
Si je peux la trouver.
Mais, le vilain Corbard
Ne veut rien écouter
Et il ferme ses mâchoires
Sur le blanc Pue-des pieds!
Je crois, c’est pas trop tard
Pour dire la vérité :
Pue-des-pieds, dans l’histoire,
Est toujours condamné.
De Renard à Corbard,
Commence l’échauffourée.
Pue-des-pieds, sans retard,
Fuit, en longues coulées.
Tant je dis cette histoire,
C’est fini de pleuver
Et il n’est pas trop tard,
Pour nous faire à goûter.