Un moment pas génial, car l’enfant est spécial Un moment pas facile, comme il est sur le fil Un moment de balance, de vide et de silence Un moment pas glorieux; je vois déjà ses yeux
« C’est de la chair de Limane, finement ciselée et cuite en serpettes. Quand il s’affole, le Limane, il se tient tout figé. C’est alors que l’on peut le peler et le trancher, tout debout-vivant. Une autre variété, qui est plus saisonnière, a le collet tombant. Là, tu as le corps de Nector; Nector, c’est le chien qui n’a peur de rien et c’est pour ça qu’il est mort. On en fera du pâté. Il y a trop rien à garder et c’est pas lui qui viendra finir les restes! Ça, c’est du gonflement, de pois et de froment, pour éponger le sang de la sauce rouge. Après, tu mélanges tout; tu les sers. »
Je m’escale dans le temps et m’arrête dans un moment improbable. J’ai une mémoire de mérovingien pour ce qui est de l’enfance, de la nature, des images et des instants de froid. Le froid ouvre la porte d’un maintenant où rester; la nuit le fait aussi. C’est à travers le presque froid et la presque nuit que j’ai commencé. J’avais presque les dix ans quand j’ai appris l’heure de la chauve-souris, que j’aurai ma présence seule en le dedans de tout ceci!
Je courais à pleine volée; j’avais encore ma chance. Mon frère venait de se faire manger par le rideau de pluie; c’était le dernier. Je courais comme un acharné; j’y étais déjà presque. Je me suis arrêté, c’était trop beau; j’étais dans le beau d’un tableau, pile en son centre: « L’herbe verte ondulait, spatulée; le soleil faisait brûler les jaunes et la pluie zébrait ses rayons de miel. » De grosses gouttes tintèrent mes épaules; je courais à pleine volée; je n’ai pas été trempé. Victoire!
Le Temps, il a vite contourné le Vent cherchant à l’effacer. Le Temps tente de serpenter; le Vent, il veut pas le lâcher. Le Temps, il sera pas sauvé; le Vent saura le débusquer!
Le Joli, c’est le Beau quand il est endormi Dans un matin nouveau, monte un soleil poli Le Joli fait tableau de toute une symphonie En ce bordant de l’eau, vit aussi une ortie
Un brouillard humide lèche le front des arbres La brume étend ses doigts et tente de s’insinuer De petits nuages laineux courent la lande Le berger qui les mène est un vent prudent
Quelques rais de lumière dans les cheveux des arbres Les feuilles mortes craquent et la fougère crisselle Le geai a déjà crié; une tiédeur profonde Et un parfum d’années emplissent les bois