La Bête rôde!



Affamée, en surnombre,
La bête attend son heure.
Et, c’est dans ces bois sombres
Que vit ce prédateur.

Elle a trop peur de l’homme,
Pour se nourrir de lui.
De la bête de somme,
Le sang lui fait envie.

C’est une grande chauve-souris!


Corvée de bois, jusqu’au bord de la nuit. Les hommes sont fatigués.
On range le matériel et on charge, tant qu’on peut, la charrette.
Le cheval veut rentrer et se met à piaffer. Les jeunes veulent rentrer.
Ce soir, c’est fête au village. Il y a le magicien, arrivé ce matin.
Sur la place, l’accordéon fera danser filles et garçons.
Alors, on se dépêche, on ne fait plus attention.
Un grand oiseau bizarre plonge sur le canasson.
Le temps de prendre les triques, il le suce comme un tique.
Il s’enfuit dans la nuit, par les hommes poursuivis.
Morsure empoisonnée, le fier animal faiblit.
On détache la charrette et on rentre au village, à pas ralenti!




Affamée, en surnombre,
La bête attend son heure.
Et, c’est dans ces bois sombres
Qu’est notre prédateur.

La bête s’en prend à l’homme
Et lui glace le coeur.
Elle ne chasse que l’homme,
C’est notre prédateur.

Son vrai nom, c’est la Peur!


Les hommes, fourbus, s’évertuent à pousser la charrette.
Le cheval n’en peut plus, tant et tant on l’a chargée.
Les arbres se mettent à bruisser. Les coeurs se mettent à taper.
Les hommes pensent que la bête se tient, là, tout à côté.
Il ne faut pas se retourner. Regarder en arrière lui permet d’approcher. Les hommes se surveillent. Un vient à craquer, tous sont en danger.
Il y a deux étés, on a retrouvé, dans ces bois, le chariot du gros Jean.
La cargaison était intacte, mais ses passagers s’étaient envolés.
La bête a encore frappé, hier. Elle a pris la Marie qui courait, affolée.
Ne pas regarder en arrière! Les lueurs du village sauront les rassurer.
Alors, tout sera terminé!

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A la croisée des chemins!

— Je l’ai vu, je l’ai vu. Ecoute-moi! Je l’ai vu. Il était encore là!
— Je t’écoute. Tu l’as vu. De quoi parles-tu? Qui ça?
— Celui de la dernière fois. Il était à la croisée des chemins.
Je l’ai vu. Il me regardait!
— Tu es sûr? Qu’est-ce qu’il faisait? Il ressemblait à quoi?
— Il ressemblait à un type, tout grand et tout maigre.
Il ne faisait rien, il regardait vers moi!
— Je te crois. Viens, on va aller voir. Donne-moi ta main!
— Il était là. Il m’a regardé de loin et puis il est parti!

On a marché, sous le ciel violacé. Les sapins tremblaient.
On s’est arrêté à la croisée des chemins. Il n’y avait rien!

Peu de temps après, nous avons décidé de déménager.
J’ai prétexté vouloir nous installer plus près de sa mère.
Il ne s’est plus rien passé, le type ne s’est pas manifesté.
Le gamin est serein. Il dort bien et il voit plus ses copains.

Un jour, quand il sera plus grand, je parlerai à mon gamin.
A son âge, je l’ai vu, ce grand type maigre qui l’observait.
Mais, personne ne me croyait. Il restait là, à me regarder!

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Soir de canicule!

Je rejoins ce nuage laiteux où je dépose mon sommeil. Enfin, ce monde fabuleux où tout me précède. Je me couche, je m’endors et je me lève!

D’une terrasse bleue, je regarde un grand champ herbeux et, au loin, deux soleils. Sur une échasse, un abomiffreux peint des nuages et chancèle. Son pot de couleurs se renverse et s’écoule en rivière.
Plus rien, alors, ne protège du chaud ce monde aux criquets gourmands qui lorgnent vers moi, maintenant.

Je me recouche, dans mon rêve, pour aller ailleurs.

Je suis chez moi. J’ai du trouble avec ma chaudière.
Trop chaud, l’air me cuit la peau. La sueur colle mon dos.

Je crois trouver un monde avec de l’eau, mais voilà que je me réveille.
Je regrette de ne pas avoir chercher, plutôt, le monde du vent.

J’aurais pu me confier à ses courants d’air.

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De mon aîné!

Le train de 19h52 ne va pas tarder.
J’ai le temps de faire la vaisselle.
Après, j’irai à la gare, te chercher.
On s’est parlé au téléphone, la veille.
J’avais regardé ton match, à la télé.
Tu levais tes grands bras vers le ciel.
Géant, au visage blessé par des abeilles!

J’ai peur que les coups n’abîment ta cervelle.
Tu me lis, toujours, ton tout dernier poème.
Tu veux me montrer que tu n’as pas changé.
Tu dis que tu vas raccrocher, écrire des nouvelles.
Tu veux que je te conte des histoires du passé.

Je tourne à gauche et longe la voie ferrée.
Je vois l’arrière de ton train! Il m’a dépassé.

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De mon cadet!

Petit, après le coucher, tu te glissais sous la table, comme une anguille. Je te savais là. Je racontais une histoire que je ne finissais pas.
J’allais dans ta chambre pour le bonsoir. « Tu finis l’histoire? »

Tu es instituteur. Tu as deux enfants qui ne te ressemblent pas.
Tu es aussi conteur. Des histoires pour les grands.
Samedi, tu fais spectacle. Ton grand frère est là. Il viendra, avec moi!

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P’tit déj!

Le petit, dans l’eau, à clapoter.
Sa soeur touille ses croquettes au miel.
Le plus grand ne veut pas se lever.
Le chat court après une abeille.
J’ai le temps de reboire un café!

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Chez moi!

J’habite la loge du concierge, prés de l’entrée. A part moi, il n’y a personne. La nuit, je monte dans les étages. De longs couloirs, des portes, une ambiance surannée! Quand les veilleuses se mettent à clignoter, tout se met à changer. Il faut être prêt à voir des choses bizarres, sinon il ne faut pas monter.

Au premier, un long couloir, des portes fermées. Cela ressemble à un vieux lycée. Le couloir n’est plus droit. On entend des voix derrière les portes, mais on ne peut pas entrer.

Au deuxième, la porte, tout de suite à gauche reste toujours entrebâillée. C’est une ancienne fabrique, au toit défoncé. Une odeur de graisse, une pendule arrêtée. Savoir-faire et temps passé. Poussière et toiles d’araignées. Des formes diffuses attendent devant la pointeuse, la gamelle à la main.
Tout au fond du couloir, maintenant fortement incurvé, une serre aux lumières sauvages et aux plantes géantifiées. C’est comme un coeur vert qui palpite. Il faut faire attention où on met ses pieds. Au centre de la serre, une mare, des poissons figés. Une pellicule translucide recouvre la surface.
J’entends un « ploc ». Un des poissons s’agite. Une couleuvre essaie de se faufiler.

Je monte au troisième, je franchis la porte-incendie pour me retrouver dans une étrange vallée. Des arbres inconnus, mais d’une grande beauté. Des sous-bois aux bruits étouffés. Quelques oiseaux, aux ailes trop grandes, planent dans le vent sifflé. Au loin, la fumée d’une cabane. De petits mammifères nocturnes, aux yeux troublants, se sont installés dans le grenier. La porte est ouverte, je rentre. La cafetière est dans l’âtre, le livre est sur la table. Une nouvelle histoire m’attend, on dirait. Je me sers un café, je prends le livre et je vais m’assoir devant l’entrée. Un grand silence s’est posé sur le bois. Je lis, comme il me l’a appris, à mi-voix.

Je vais directement au septième. Une chambre très cosy, des lumières tamisées. Un violon sur le lit. Dans un verre à eau, un dentier. Personne!

Je redescends. Demain, j’irai au huitième et, peut-être, un peu plus haut.

Je fais un détour par la cave, comme à chaque fois. Là, je viens contempler le marais. L’ambiance y est un peu triste, c’est vrai. Des souvenirs pesants y sont enfouis.
Des traces de pas! Quelqu’un est venu puis reparti. Un squelette aux os polis dépasse un peu de l’eau. Flottent, éparses, quelques photos jaunies!
Je referme la porte et je rentre chez moi.


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De l’effet d’un gun!

Histoire vraie!

Je ne dirais ni qui, ni où. Je dirais quand, il y a une trentaine d’années.

Une mère que je ne connaissais pas, d’un gamin que je connaissais, m’appelle un soir, tard. Son garçon a vécu quelque chose de terrible. Elle m’appelle pour l’aider. C’était un de ces petits jeunes, seize ou dix-sept ans, qui passaient régulièrement chez moi.

Le garçon est dans sa chambre. La mère m’explique. Il vient de se faire mettre à genoux, revolver pointé sur le front, par un de ses camarades. Il n’arrive pas à dormir, pas à parler.
Je lui propose de faire un dessin. Il attrape la feuille, les feutres et dessine posément, dans son coin. C’est le bout d’un gun, de face, au feutre noir, avec du rouge pour l’intérieur du canon, qu’il me donnera, au bout de sa main!
Je le prend avec moi, lui fait faire deux ou trois exercices, pour bloquer ce poison qui, en lui, continue à entrer. Maintenant, il parle. Il dit qu’il peut dormir. Je le ramène chez lui.
Il dit qu’il viendra me voir demain. La mère va le surveiller et faire ce qu’elle pensera à faire. Là, on est tous bousculés! Moi, j’irai voir le maire. Les gendarmes, c’est son affaire à elle. Je promets de témoigner.

Je me lève. Un café, une clope, avant d’aller voir le maire. Je me prends à bailler. Les voilà, bourreau et victime, qui vont défiler à ma porte. Le coupable, d’abord. Lui aussi, il n’est pas frais.
Viendra la victime, quelques instants après! Ils ont failli se croiser.

Le maire appellera la mère de la victime. Il ira voir le père du coupable, propriétaire du gun.
Les deux gamins évolueront bien, surtout le bourreau. Ils grandiront et redeviendront copains.

Toutes les sales histoires ne finissent pas bien! Tu décides quoi, tu fais quoi, après ça?

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En vacances!

A gauche :
Eh, pousse-toi, s’il te plaît.
( Il s’assoit lourdement.)
A droite :
Non, je suis déjà serré.
Au milieu :
Fais attention, tu m’écrases!

Devant :
(En choeur!)
Ah, non! Vous n’allez pas commencer.

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Au commencement!

On dit qu’il y a le bien, le mal, le paradis et l’enfer. On dit, qu’au début, il y avait le ciel et la terre. On parle de Big-bang. Mais ce n’est que l’avis de singes blancs, sur une tout petite terre.

Je vais vous raconter ce qui s’est réellement passé.

Au commencement, il y avait un grand vers. Un grand vers blanc et un grand univers. Le vers a mangé l’univers, terre après terre. Il a tout dévoré. Maintenant, il ne reste rien. Le grand vers a faim. Il attend, vautré, à ne rien faire.

Le vers, c’est un grand tube élastique, avec deux bouts, deux bouches fort peu sympathiques. D’un côté, il y a Saturnin. De l’autre, il y a La Mère. Avant, c’était un couple exemplaire. Mais, Saturnin avait toujours faim. Il n’y pouvait rien. La Mère arrosait les déserts, en vrai jardinier. Elle chantait aux singes blancs, en des terres azurées!

Comme ils ne sont plus qu’eux deux, ils ne font que s’engueuler. Quand La Mère tire vers l’avant, Saturnin tire vers l’arrière. Leur grand corps élastique finit par céder et se scinder en deux. Ils sont deux, maintenant, à vivre séparément.

Saturnin n’est que ventre. Il veut l’adultère. La Mère veut un amant plus charmant. D’un coup de pied au ventre, elle se débarrasse du sien. Saturnin a mal à en dégueuler. Il vomit tout l’univers. L’univers reprend sa place entière. C’est aussi le retour de la vie-semence. C’est ici que commence l’histoire des singes blancs.

Ici, assurément, ça devient l’enfer. A dire ça, je ne crois pas qu’on exagère.

Moi, ce qui me ferait vraiment flipper, ce serait de voir ce vieux couple se rabibocher. Ce serait de voir le grand vers se reconstituer. Ce serait de voir tout recommencer, sans pouvoir rien y faire.
Sans pouvoir dire : Arrêtez, c’est assez!

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